Histoire de guerre, histoire d’amour

Depuis mon plus jeune âge, mon père me raconte son enfance bercée par le bruit des armes à feu.

Il vit le jour en 1969, à cette époque, le Cambodge était plongé dans un chaos sans nom.

En effet, cela faisait deux ans que la guerre civile avait débuté, opposant les loyalistes, fidèles au roi et les Khmers rouges de Pol Pot dans un contexte de guerre froide.

Dès sa naissance, on lui avait appris à marcher et à survivre, puisque chaque nuit les rues étaient en proie aux fusillades. Sa famille n’était en sécurité nulle part.

Un jour, la guerre civile prit fin et les khmers rouges l’emportèrent sur les loyalistes. Mon père n’était qu’un simple petit fermier essayant de survivre avec ses parents, ses quatre frères et sa sœur aînée. Il fut forcé de rejoindre les écoles communistes.

Il me racontait que durant ce règne de terreur, il ne pouvait revoir sa famille qu’une seule fois par an jusqu’à cette année fatidique de 75, lorsque les Vietnamiens envahirent le pays pour libérer le peuple khmer opprimé par Pol Pot et ses partisans.

Avant la nuit de l’offensive des Viêt-Cong, mon grand-père et ma tante avaient réussi à fuir le Cambodge pour rejoindre le Vietnam. Mon père et le reste de sa famille se préparaient à partir également mais il était déjà trop tard. A l’aube, les Vietnamiens lancèrent l’offensive ne laissant aucune chance à mon père et sa famille de rejoindre le pays voisin.

Mon père ne revit plus sa sœur et son père gravement malade pendant longtemps.

Contrairement à ce que l’on pense, la guerre peut être bénéfique, 75 restera une année pour toute ma famille.

De l’autre côté de la frontière, la vie était aussi chamboulée au Laos où ma mère venait à peine de naître. Quand les Vietnamiens lancèrent l’offensive au Cambodge, mes grands-parents maternels saisirent l’occasion pour s’enfuir en France avec l’aide de mon grand-oncle et de ma grand-tante, qui étaient partis y étudier.

Depuis quelques années, le Laos n’était pas non plus à l’abri d’une guerre civile ou de la guerre venant d’un pays voisin. Avant 75, la famille de ma mère était déjà préparée à l’exode avant celle de son futur mari. Contrairement à mon père, elle avait des contacts en France, ce qui avait facilité l’immigration à l’aube de la guerre. Ma mère quitta le Laos à l’âge d’un an avec ses deux frères aînés et ses parents, même si le début était difficile, ils finirent par se débrouiller.

Ma mère est arrivée à l’âge d’un an en France et elle a passé toute sa jeunesse ici, contrairement à mon père.

Après la guerre entre le Cambodge et le Vietnam, la stabilité et la paix semblaient revenir dans le pays, en réalité, pas vraiment. À l’âge de 20 ans, mon père réussit à fuir la misère du Cambodge pour rejoindre la France, 14 ans après le départ de ma mère d’Indochine.

La première chose qu’il a faite pour oublier les horreurs de sa jeunesse, c’est un roadtrip à travers toute l’Europe, avec ses amis qui étaient venus avec lui du Cambodge.

Ses premières années en Europe furent particulièrement satisfaisantes, la vision des Européens changeait radicalement.

Mon père avait rencontré beaucoup de personnes depuis son arrivée et un jour, un ami l’a invité à un mariage. Ma mère faisait partie des invités d’honneur de la mariée. Depuis ce mariage, mon père et ma mère commencèrent à se voir fréquemment jusqu’à leur mariage en 95.

Bien qu’ayant une origine différente, mes parents se ressemblent.

Même si la guerre avait pris beaucoup de choses à mes parents, le hasard et la chance finirent par les réunir. La guerre est peut-être affreuse avec des conséquences désastreuses, mais il arrive parfois que le destin offre aux martyrs un nouveau départ et une nouvelle terre promise, afin de bâtir un avenir commun.

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