La surprise du chef
A 18 ans, mon père se trouvait dans un camp militaire avec une vingtaine de jeunes de son âge. Il était engagé pour trois ans, afin de se préparer à une éventuelle guerre si un jour il devait y en avoir une.
Il y avait un grand château à 5 kilomètres de là. Les jeunes militaires n’étaient pas autorisés à rentrer dans le château sauf pour effectuer les punitions ou les corvées.
Dans le camp, se trouvait une petite cabane ou il y avait les dortoirs avec les lits superposés. L’endroit était bien étroit pour accueillir 20 personnes.
Après un mois de routine mon père trouvait déjà le chef grincheux et sévère.
Les journées étaient toutes plutôt banales à vrai dire, mais cependant mouvementées car il devait se lever tôt pour d’éventuels exercices.
Un jour, le chef est venu réveiller ses hommes ; il semblait de bonne humeur. Mon père, habitué à le voir plus renfrogné, trouva cela bizarre.
Le chef leur dit pour la première fois depuis leur arrivée :
« Prenez votre temps, les garçons, et quand vous serez prêts, suivez-moi dans le château, il y a le commandant *** qui arrive, il faudra faire bonne impression ».
Aider les dames de service à préparer un grand festin et nettoyer le château étaient la tâche du jour.
Il m’a dit que tout le château était rempli, mais que le commandant n’était toujours pas arrivé, il se faisait tard, il restait encore des gens mais la moitié était partie. Quant au buffet, tout avait été mangé ou jeté.
Un peu plus tard, le commandant arriva.
Tout le monde lui parlait, ce jour-là, ce fut la première fois que mon père vit le chef, ‘lécher les bottes d’une personne’.
Le chef commença à avoir faim il voulait la dernière spécialité du château.
Personne, pas même le chef, ne sut répondre et lui dire qu’ils avaient tout fini depuis bien longtemps.
La tension était palpable.
Mon père prit la parole et dit : « je vous prépare ça toute suite ».
Il se dirigea en cuisine avec l’un de ses camarades.
Arrivé dans la cuisine il nettoya une assiette, regarda son compagnon, puis la poubelle avec la nourriture. Son camarade lui dit : « Non, tu vas quand même pas faire ça. » et mon père, toujours sûr de lui, se mit à trier les plus beaux déchets.
Il prépara sa plus belle assiette, avec les rebuts qu’il rendait présentables.
Lorsqu’il eut terminé il se dirigea vers le commandant avec son plat à la main tout content d’avoir fait une bêtise. Il posa le plat sur la table du commandant.
Tout le monde regardait mon père.
Et puis, le commandant prit une bouchée et dit : « ça va ».