D’Austerlitz à Waterloo

C’était un 27 décembre, un jeudi plus exactement, et la journée commençait merveilleusement bien, avec le chant mélodieux des oiseaux pour nous réveiller tout en douceur. Le ciel était bleu et le soleil brillait.

Bon, maintenant, la vraie version. C’était toujours un jeudi 27 décembre, et mon frère et moi-même nous étions réveillés quelque peu étourdis étant donné qu’il était 6 heures du matin ! Nous étions censés prendre un train gare d’Austerlitz afin d’y rejoindre notre père à St-Pierre-des-Corps, qui lui-même avait pour mission de nous emmener chez ma tante, où toute la famille était déjà réunie.

Inutile de préciser que la journée ne s’est absolument pas passée comme prévue.

 En effet, pour commencer la journée en beauté, mon frère s’était réveillé malade, victime d’une overdose de foie gras. Cet imprévu avait légèrement refroidi son enthousiasme initial à l’idée de rejoindre notre famille. Mais, insensible et indifférente à ses plaintes, je l’avais fortement incité à venir malgré son état déplorable. Ma mère nous avait donc accompagnés jusqu’à la gare. Malheureusement, en dépit de sa grande connaissance géographique de Paris, elle n’était jamais allée à la gare d’Austerlitz. Comme à son habitude, elle s’est énervée et comme nous l’avions prédit, nous avons raté notre train.

Nous avons donc été contraints d’échanger notre billet mais cette fois-ci, notre train était à la gare St-Lazare. Oui, oui, vous avez bien lu, on nous a échangé un train qui était gare d’Austerlitz avec un autre qui était gare St-Lazare, ce qui a d’ailleurs failli nous empêcher de jamais quitter Paris.

En effet, en voulant nous informer de la place qui devait nous être attribuée dans le train (car oui, nous n’avions pas de place attitrée), la contrôleuse s’était ouvertement moquée de notre mésaventure. Heureusement, son collègue nous avait autorisé l’accès au train et mon frère et moi nous y étions installés…pas dans les fauteuils confortables de la 1ère classe, mais bien sur les strapontins que l’on trouve entre deux wagons. Vous savez, l’endroit tout étriqué où se trouvent la plupart du temps les toilettes. Voilà, nous étions là !

Rappelons maintenant que mon frère était malade et vous pouvez dorénavant comprendre l’incommodité de la situation. Le voyage s’est plutôt bien passé, si on omet le fait que mon frère avait passé plus de la moitié du voyage aux toilettes (finalement, les toilettes à côté, c’était plutôt pratique). Une fois arrivés, nous avons donc embarqué destination Périgny.

C’est là qu’est survenu un troisième problème. Je me suis, à mon tour, sentie un petit peu barbouillée. Mon père, croyant que je jouais la comédie, n’y avait prêté guère attention. Mal lui en a pris ! Car une fois dans la voiture, tout ce que je peux vous dire, c’est que ça n’a été drôle ni pour mon frère et moi, ni pour mon père. A un point précis du voyage, mon frère se sentait au plus mal nous condamnant à nous arrêter à Niort, en plein centre-ville.

Mon père avait donc profité de cette pause pour prévenir ma tante d’un léger retard mais c’est lorsqu’il a précisé que nous étions malades que tout a basculé. Ma tante s’est soudain déclarée « plus très chaude » pour nous accueillir et mon père, surpris de cette réaction et de ce manque flagrant d’esprit de famille, lui a raccroché au nez. Pour résumer, alors que nous étions à 60 km du point d’arrivée (à 60 petits km !), nous avons rebroussé chemin jusqu’à la Garenne-Colombes. Rappelons aussi qu’une distance d’environ 400 km sépare Périgny de La Garenne-Colombes ce qui fait que nous avons parcouru pas loin de 800 km en une journée, de 6 heures du matin jusqu’à 9 heures du soir, une journée entière dans les transports, malades et éreintés, dans le seul et unique but de rejoindre notre famille, qui ne s’est même pas donné la peine de nous accueillir. Nous étions des espèces de microbes nomades et ils nous avaient interdits de séjour.

Un unique vœu pour la nouvelle année, qu’ils tombent malades à leur tour !

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