Paul Lapie 1942

Photo de classe 1942

Frais émoulu de l’enseignement primaire dans une école communale du sud de l’Oise (qui n’était pas encore 60) j’avais été inscrit pour la rentrée 1942 dans ce qui s’appelait alors le Collège Paul Lapie (quel drôle de nom !).
Mes parents habitaient dans un minuscule appartement au rez-de-chaussée sur cour d’un
des tout premiers immeubles de la rue de Strasbourg, côté Asnières de la gare de Bécon-les-Bruyères (encore un drôle de nom !).
A noter que, pour la plupart, mes condisciples de l’école communale sont entrés la même année ou peu après, dans ce qu’on appelle aujourd’hui la vie active et qui pour eux était le boulot.
Mon cartable à la main (la gibecière ne se portait plus guère une fois sorti du primaire), je me pointais vers le collège, sans crainte mais sans enthousiasme non plus à dire vrai .
Il me fallait longer assez longuement un terrain vague grillagé, traverser un boulevard où circulaient des trolleybus (le boulevard de Verdun probablement).
Et je rejoignais la classe de Sixième Moderne 2.
Pourquoi la M2 ? (allemand première langue).
Mes parents, ainsi que la plupart de ceux des collègues, m’avaient inscrit en anglais première langue. Résultat : sur une soixantaine de potaches destinés à la 6ème peut-être une dizaine étaient candidats pour l’allemand. L’époque n’était pas favorable au consensus et par une méthode indiscutée sinon indiscutable apparentée au système Amstramgram une égale répartition a rétabli l’équilibre entre M1 anglais et M2 allemand. Et voilà pourquoi Wer will der kann au lieu du Carpentier-Fialip. Je dois dire que je ne l’ai jamais regretté.

Il me semble que nous suivions les cours de cinq professeurs.
Je me souviens de trois d’entre eux :
– Maths et sciences : un ancien instituteur très pédagogue, un peu paternel peut-être.
– Allemand : plus jeune; on l’appelait D’Artagnan à cause d’une mouche et d’un feutre à larges bords.
– Français et Histoire-géo : (Leparc ?) très jeune-première année d’enseignement ?- terriblement pète-sec mais redoutablement efficace. On n’en menait pas large quand il vous apostrophait d’un  « Jeune homme !  » glacial. Toute la classe a ressenti sincèrement émotion et chagrin lorsque, avant la fin de l’année scolaire, il nous a annoncé son départ prématuré car requis par le STO.
Je me souviens du gymnase au dernier étage. Quand vous aviez réussi à vous hisser en haut de la corde lisse et que vous pouviez vous y agripper quelques secondes vous aviez quelque- fois le privilège d’assister à une course de lévriers au cynodrome.
Je n’ai pas de souvenir d’une cantine. Probablement rentrions-nous tous à la maison pour le déjeuner.
Quels étaient nos jeux de récréation ? je n’en ai pas de souvenir en dehors peut-être des osselets à la belle saison.
Notre jour préféré restait le mercredi qui à l’époque tombait d’ailleurs un jeudi.

Je n’ai pas rejoint Paul Lapie à la rentrée suivante. L’appartement de la rue de Strasbourg ayant été détruit par les bombes de septembre.
Mes souvenirs entrent alors dans une zone de turbulence. Je sais avoir suivi, dans le cadre du collège, quelques cours dans un établissement parisien (Charlemagne ?) mais je ne sais plus à quelle période. La suite de ma scolarité jusqu’à la rentrée de 1945 présente un profil plutôt chaotique.
Sur la traditionnelle photo de la promotion 6M2 1943, on peut contempler 33 garnements, septuagénaires en culottes courtes qui illustrent la pénurie de cirage . L’un d’entre eux a porté l’étoile jaune sur son manteau. Un autre a perdu un bras lors de l’un des bombardements. On y chercherait vainement l’enfance d’un grand de ce monde, un Président de la République ou même un Premier Ministre.

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